C’est la fin des cours. Tu te dépêches, tu prends ton sac. Ton cousin arrive bientôt chez toi. Tu as hâte de le voir ! Tu marches vite. Tu es content. Tu marches dans le couloir. Tu entends une voix au loin.
« Hé ! Toi, le petit ! » Tu as le cœur qui bat plus fort. Tu veux juste regarder devant toi. Tu espères qu’il parle à un autre que toi. Tu marches plus vite. La voix se rapproche.
« Hé, minus, c’est à toi que j’parle ! » Tu fermes les yeux. Tu essaies de rester calme. C’est difficile. Tu te sens nerveux. Tu as le corps qui se raidit de plus en plus. Il est juste derrière toi. C’est bien à toi qu’il parle. Tu veux éviter de le regarder. Tu baisses la tête. Tu te retournes sans le regarder. Tu sais qu’il est grand. Tu crois même savoir qui c’est. Tu es inquiet. Tu cesses de bouger. Le cœur bat vite.
« Hé ! J’te parle ! » Tu sens ses amis se rapprocher. Ils t’entourent. Tu fais un pas pour reculer. Tu as peur.
« Hé le p’tit, tu t’en vas où comme ça ? » Brusquement, il te met la main sur l’épaule. Tu restes figé, incapable de bouger. Tu sens les battements de cœur dans la poitrine. Tu veux parler, mais aucun son ne sort de la bouche.
« Avec des grosses lunettes comme les tiennes, tu ne dois pas voir où tu marches ! Ah ah ah ! » Tu serres les dents. Tu te sens devenir rouge. Tu as chaud. Tu serres les poings.
« Oh ! Tu es fâché ! Oh ! » Tu veux partir. Le grand se met devant toi. Tu essaies de le contourner. Il bouge pour te bloquer le chemin. Tu as la gorge serrée. Tu as envie de pleurer. Tu as peur. Tu veux voir quelqu’un. Tu as besoin d’aide. Tu regardes autour de toi. Tu essaies de trouver quelqu’un. Il n’y a personne, comme si tu étais seul dans l’école. Seul avec eux. Tu paniques, tu as peur. Tu as envie de crier : « À l’aide ! » Aucun son ne sort de ta bouche. Tu as trop peur. D’un geste brusque, le grand t’enlève tes lunettes. Là, c’est trop ! Tu cries : « Donne-moi mes lunettes ! » Tu vois tout embrouillé. Tu avances sans tes lunettes. Tout est flou, partout. Tu essaies de voir. À cause du strabisme, un problème aux yeux, tu as toujours besoin de tes lunettes. Tu tends les bras. Tu essaies d’attraper tes lunettes.
« Oh ! Tu vois rien ! Ah ah ah ! Vous voyez ça, les gars ! » Tu as le visage tout rouge. Tu avances vers lui. Tu serres les poings. Tu trembles.
« Ouuuh ! J’ai peur ! Ah ah ah ! » Et il te pousse fort sur l’épaule. Tu perds l’équilibre. Tu tombes par terre. Tu serres les lèvres. Tu as le goût du sang dans la bouche. Tu as envie de pleurer, mais tu retiens les larmes.
« Cherche-les tes lunettes, le chien-chien, elles sont par terre. » Les larmes coulent. Tu tâtonnes le sol avec les mains. Tu cherches tes lunettes. Soudain, tu entends des pas. Il y a quelqu’un. Enfin ! Tu ressens comme un petit soulagement, comme si le mal s’en allait. Tu essaies de voir qui c’est. Il y a quelqu’un de plus grand que toi qui s’approche, de plus en plus. Tu te demandes s’il est gentil ou agressif et méchant...
« Qu’est-ce qui se passe ? Qu’est-ce que vous lui faites ? » Tu éclates en sanglots. Tu pleures fort. Tu le regardes, sans bouger.
« Allez, on s’en va les gars.» La personne te redonne tes lunettes. Elle te met la main sur l’épaule, elle est si bienveillante, si douce.
« Je suis là. Voilà. Il y aura des conséquences pour eux.» Tu pleures. Tu te sens si blessé et faible. Elle te prend la main pour t’aider à te relever. Les joues mouillées de larmes, tu lui dis : « Merci ». Elle te sourit. Tu respires, le cœur soulagé. Tu te dis : « Moi, je veux être comme cette personne. Gentil et bienveillant. »