Tu ouvres les yeux et tu souris. Ce soir, tu as un rendez-vous inespéré... Tu t’entends encore lui dire que tu adores cuisiner. Tu pinces les lèvres, quel mensonge ! Mais ça a marché ! Tu l’as invitée à manger chez toi ce soir. Tu t’étires et tu te lèves. Cette sieste t’a fait du bien. Oh ! Déjà 18 heures ! Ton invitée arrive dans moins de deux heures.
Tu regardes ton téléphone portable. Tu regardes si ton ami cuisinier t’a écrit. Rien ! Tu as un moment d’inquiétude. Il devrait pourtant être déjà là avec le repas que tu lui as demandé de préparer ! Tu lui envoies un message pour savoir quand il va arriver. Bip bip bip ! En attendant, tu vérifies que la table est bien dressée. Tout est impeccable... Il manque SEULEMENT le repas ! Tu regardes encore ton téléphone. Ça serait trop bête que ton invitée arrive avant la nourriture, surtout que tu lui as beaucoup parlé de tes talents culinaires ! Tu souris.
Oh ! Un nouveau message ! C’est ton ami cuisinier. Tu lis nerveusement le message. Il est malade comme un chien, cloué au lit. Tu dois te débrouiller seul ! Fâché, tu lances le téléphone sur le sofa. Tu cours jusqu’au frigo. Tu ouvres vigoureusement la porte, paniqué. Tu fais l’inventaire de ce qui peut être un plan B. Tu vois deux pâtisseries. Heureusement que tu les as déjà achetées, c’est toujours ça. Il y a la bouteille de vin... Tu la touches, elle est bien fraîche, c’est bon ça aussi.
Deux filets de poisson... Tu vois aussi quelques œufs, un morceau de beurre et un pot de mayonnaise. Tu te penches un peu plus et tu regardes au fond du frigo. Tu aperçois un pot contenant une substance très douteuse... Tu préfères éviter d’y toucher pour l’instant ! Tu ouvres le tiroir du bas. Tu vois des pommes de terre et des carottes un peu molles. Humm ! C’est bien insuffisant pour impressionner quelqu’un. Tu refermes le frigo et tu ouvres la porte du garde-manger. Tu y trouves une boîte de conserve de ta soupe préférée. Un minestrone, une soupe aux légumes italienne. Nerveusement, tu retournes la boîte pour vérifier la date de péremption. Fiouu ! Elle est encore bonne ! Heureusement, car dans ton quartier, tout est fermé aujourd’hui à cette heure-là !
Tu vas chercher ton téléphone sur le sofa. Tu composes le numéro de ton ami cuisinier. Il est hors de question que tu rates ton opération de séduction ce soir ! Ton ami répond. Tu lui dis que tu as absolument besoin de son aide ce soir. Il te répète qu’il est trop malade. Il te dit que tu n’as qu’à rajouter beaucoup de fines herbes. Tu raccroches un peu fâché. Mais où croit-il que tu peux trouver des fines herbes à cette heure-là ?
Tu t’approches de la fenêtre en réfléchissant. Tu t’exclames : « Madame Laplante ! » Tu te souviens que madame Laplante, ta voisine, a quelques pots de fines herbes. Elle est partie en vacances, mais ses pots de fines herbes sont dehors, dans la cour. Allez, c’est pour la bonne cause ! Tu prends une paire de ciseaux, tu sors par derrière et tu te diriges vers la cour de madame Laplante. Tu arrives devant les pots de fines herbes. Humm... Quoi cueillir ? Allez ! Un peu de ci, un peu de ça... Slack slack ! En quelques coups de ciseaux, tu as cueilli quatre poignées de verdure odorante.
Tu retournes dans ta cuisine en espérant que tu as cueilli les bonnes choses. Tu déposes tes herbes sur le comptoir. Tu appelles ton ami cuisinier. Tu lui demandes quoi faire avec ces herbes. Il te demande ce que tu as cueilli. Tu te frappes le front avec la main ! Quelle question ! Comme si tu le savais ! Tu prends la première herbe que tu as cueillie. Tu lui parles des feuilles vert foncé qui poussent en petit bouquet. Tu goûtes une feuille. Mmmm... Ça pique un peu la langue et ça goûte la noisette en même temps. Ton ami te dit que tu as cueilli de la roquette.
Vite, tu trouves un crayon sur le comptoir. Tu notes sur un papier : La roquette se mange plus en salade que comme fine herbe. Il te suggère de la servir pour accompagner le poisson, arrosée d’un peu d’huile d’olive et de vinaigre balsamique. Tu prends la deuxième herbe. Ça ressemble presque à des plumes vertes. Tu la sens et crois reconnaître une odeur de réglisse noire. Tu en mets une partie dans la bouche. Tu la mâches un peu. Oui, ça goûte vraiment la réglisse ! Il te dit que c’est du fenouil et ce goût de réglisse est un goût anisé.
Tu notes rapidement ses instructions : Mettre plein de morceaux de fenouil sur et sous le poisson, et cuire au four scellé dans du papier d’aluminium. Tu prends la troisième herbe et tu la sens. Ça ressemble à des tiges creuses qui sentent l’oignon. Tu en croques un bout. Oh ! Ça a un goût prononcé d’oignon. Il t’explique que c’est de la ciboulette. Tu notes vite sur ton papier : Ciboulette, délicieuse ciselée très fine, dans du beurre fondu, sur tes pommes de terre au four. « Ciselé, ça veut dire coupé finement », te dit-il en devançant ta question. Ah oui ! Ça évitera de chercher sur internet.
Tu regardes la dernière poignée de feuilles. Tu lui dis que c’est du basilic. Tu connais bien le basilic, ton amie italienne en met partout. Tu sens les grosses feuilles que tu tiens, mmmm ! Mais tu lui avoues que tu ignores quoi en faire... Il te répond qu’une petite poignée de basilic haché juste avant de servir, dans une soupe minestrone, c’est un cadeau pour les papilles gustatives. Tu remercies chaleureusement ton ami malade et tu raccroches.
Ouf ! Aucune seconde à perdre, le temps file ! Avec ta feuille de notes bien en vue, tu mets les pommes de terre et le poisson au four. Tu haches le basilic et cisèles la ciboulette. Slack slack ! Tu ouvres la conserve et fais chauffer la soupe. Tu caches la boîte de conserve vide au fond du bac. Tu sors la bouteille de vin et la débouches. Tu cours jusqu’à la chambre et tu te changes. Ding dong ! Ça sonne à la porte ! Pile à l’heure !
Tu jettes un dernier coup d’œil dans le miroir en passant. Tu affiches ton plus beau sourire et tu ouvres grand la porte. Le cœur te martèle dans la poitrine quand tu l’aperçois... Et tu entends sa si jolie bouche dire : « Mmmm, ça sent très bon ici ! »